Les nouveaux programmes de SES de la réforme Blanquer : des difficultés pour les élèves et les enseignants révélées par une enquête de l’APSES
Paris, le 03 juillet 2020
Un an après la mise en œuvre des nouveaux programmes de S.E.S. de Seconde et de Première, l’APSES a initié une enquête-bilan auprès des enseignant·e·s de la discipline. Ce retour du terrain permet de faire le point sur les difficultés pédagogiques induites par les contenus effectivement traités en classe avant la fermeture des lycées le 16 mars.[1]
Tout d’abord, une part élevée des objectifs d’apprentissage (OA) des deux programmes présente un niveau de difficulté pédagogique assez ou très important pour plus de la moitié des collègues (21,4% des OA du programme de Seconde et 27,3% des OA du programme de Première).
Certaines des difficultés rencontrées apparaissent transversales aux deux programmes :
- Des chapitres ou objectifs d’apprentissage ont un degré de technicité trop élevé par rapport au niveau des élèves, à ce stade de leur scolarité.
- Cette technicité va de pair avec la difficulté à raccrocher les objectifs du programme aux questions vives du débat public. Ce choix, couplé à une séparation disciplinaire stricte, ne permet pas aux élèves de donner suffisamment de sens à leurs apprentissages. A ce titre, en Seconde, le choix de faire entrer les élèves dans la discipline en commençant par un chapitre d’épistémologie apparaît particulièrement inadapté, alors que la consommation, finalité de l’activité économique, n’est plus abordée. En Première, la place très importante consacrée à un enseignement de micro-économie très formalisé, sur le modèle de ce qui est fait dans l’enseignement supérieur pose aussi particulièrement problème.
- La faiblesse du volume horaire et la baisse des moyens alloués à l’enseignement des SES sont aussi pointées par les collègues comme une source de difficulté de traitement du programme. Certains contenus ne présentent pas de difficultés mais nécessitent de nombreux prérequis ainsi que des savoir-faire spécifiques (notamment mathématiques) que les élèves n’ont pas le temps d’intégrer du fait de la nécessité de condenser les apprentissages pour finir le programme.
D’autres difficultés apparaissent plus spécifiques au programme de Première, certains objectifs d’apprentissage occultent des controverses scientifiques importantes, offrant une vue partiale des enjeux aux élèves.
Ainsi, ces résultats suggèrent que des passages importants du programme nécessiteraient d’être réécrits. Surtout, la lourdeur des programmes induit des difficultés pédagogiques aiguës, ce qui plaide pour un allègement significatif. En l’état, la volonté affichée d’augmenter le niveau d’exigence des programmes tout en les alourdissant et en les calquant sur les logiques d’enseignement universitaire aboutit à laisser sur le bord du chemin un nombre croissant d’élèves, et à abaisser le degré d’exigence attendu sur la maîtrise des contenus.
C’est pourquoi l’APSES renouvelle sa demande de réécriture complète des programmes à moyen terme, et sollicite d’ores et déjà pour la rentrée des allègements conséquents, d’autant plus urgents du fait d’une année scolaire 2019-2020 tronquée. En effet, un délai supplémentaire d’application ne pourra suffire à résoudre les problèmes (de fond comme de forme) s’il ne s’accompagne pas d’une meilleure prise en compte des avis et propositions des personnels de terrain.
[1] Les enseignements de l’enquête concernant les parties du programme traitées par les collègues est consultable ici.