Alors que le Ministre de l’Éducation nationale vient d’annoncer le report d’un an de la mise en œuvre des nouvelles modalités de formation des enseignant.e.s, l’APSES se joint aux nombreuses critiques qui considèrent cette annonce comme insuffisante et demande au Ministère une véritable concertation sur le sujet.

En effet, un délai supplémentaire d’application ne pourra suffire à résoudre les problèmes (de fond comme de forme) s’il ne s’accompagne pas d’une meilleure prise en compte des avis et propositions des personnels de terrain.

Sur la manière de procéder, à l’instar de nombreuses autres initiatives du gouvernement actuel, cette réforme profonde a été décidée sans aucune réelle concertation avec les corps intermédiaires et les actuel.le.s responsables des formations au métier d’enseignant.e. Seules ont été organisées des réunions de « consultation », dont n’a souvent été publié aucun compte rendu. L’APSES s’inquiète des conditions dans lesquelles s’élaborent les futures maquettes et en rappelle la nécessaire validation par les instances universitaires, censées co-organiser les Master MEEF avec les INSPE.

Sur le fond, de nombreuses interrogations demeurent. Les documents transmis par le Ministère interrogent tout d’abord sur la diminution de la place accordée à la maîtrise des connaissances disciplinaires. Au mépris de la qualification disciplinaire pourtant essentielle à la réussite du concours et la qualité de l’enseignement, l’accent est mis de manière disproportionnée sur des compétences dont on peine à voir comment elles pourront être évaluées concrètement. Si l’aspect pédagogique est essentiel à la formation, cette dernière ne peut être efficace qu’en transmettant aussi des savoirs solides et rigoureux. De plus, certaines compétences ne sont pas proprement pédagogiques mais d’un ordre difficilement évaluable. Si l’on regarde les épreuves orales comptant désormais pour 70 % de la note finale, notre inquiétude se porte sur les critères sur lesquels le jury pourrait évaluer en quelques minutes la « capacité à incarner les valeurs de la République », ou la « motivation » des candidat.e.s. Ce type de questions, si elles peuvent préoccuper un jury ayant pour mission de recruter des représentants de la République, ne peuvent à elles seules constituer le cœur d’une épreuve.

Concours, mémoire professionnel, service devant élèves : une année infernale

Notons également que le déplacement du concours en fin de Master 2, s’il donne en apparence l’impression d’un allongement du temps consacré à la préparation des épreuves, place en réalité les futur.e.s étudiant.e.s dans une situation redoutable. En effet, l’année de Master 2 est censée se dérouler en « alternance », ce qui implique pour les étudiant.e.s de concilier la préparation des concours avec l’apprentissage sur le tas d’un métier auquel elles et ils n’auront pas été assez formé.e.s et la rédaction d’un mémoire professionnel pour valider leur Master. Il est ainsi prévisible qu’une telle surcharge décourage nombre de ces potentiel.le.s futur.e.s collègues. A l’heure où le nombre d’inscrit.e.s aux différents concours d’enseignement connaît une chute aussi préoccupante que révélatrice, il est urgent de chercher à améliorer les modalités d’entrée dans le métier plutôt qu’à les dégrader.

L’APSES dénonce ainsi ce bradage de la formation des futur.e.s collègues, du premier comme du second degré, et appelle le Ministère à une véritable concertation qui s’appuie sur les besoins réels des étudiant.e.s et l’expérience des formatrices et formateurs au sein des Master MEEF afin d’offrir une formation digne de ce nom et des concours équitables à toutes celles et ceux qui aspirent à exercer ce métier.

L’APSES appelle ainsi les autres associations du secondaire et du supérieur, mais aussi l’ensemble des citoyen.ne.s concerné.e.s par la qualité de l’enseignement donné à leurs enfants, à rester vigilant.e.s et à lutter contre cette dégradation à prévoir du service public d’éducation.

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