Monsieur le Directeur de la publication,
Le 8 septembre dernier, le site lexpress.fr a publié une tribune de Pierre Bentata intitulé « Au lycée, les cours d’économie ne forment pas des entrepreneurs mais des électeurs passifs »
Ladite tribune fait apparaître des erreurs factuelles et une analyse malhonnête des programmes de Sciences économiques et sociales (SES).
Agissant en la qualité de co-président.e.s de l’Association des professeurs de Sciences économiques et sociales (APSES), qui œuvre au quotidien pour le développement de l’enseignement des SES et la défense du corps des professeur.e.s de SES, nous entendons faire usage du droit de réponse suite à la parution de cette tribune.
Ainsi, vous trouverez ci-après notre réponse à ces allégations.
Par la présente, nous demandons la diffusion de l’intégralité de son contenu sur le site internet que vous hébergez.
En vous remerciant de l’attention que vous porterez à notre demande, veuillez agréer, Monsieur le directeur de la publication, nos respectueuses salutations.
Emmanuelle Caley et Benjamin Quennesson, co-président.e.s de l’APSES
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Droit de réponse de l’Association des professeurs de Sciences économiques et sociales (APSES)
L’Association des professeurs de Sciences économiques et sociales (APSES) a relevé un grand nombre d’approximations voire de contre-vérités une tribune de Pierre Bentata « Au lycée, les cours d’économie ne forment pas des entrepreneurs mais des électeurs passifs », publié par l’Express le 8 septembre 2025.
Ce n’est pas la première fois que les programmes de Sciences économiques et sociales (SES) sont attaqués avec des arguments fallacieux, dans un objectif idéologique clair de promotion d’une unique vision de l’économie.
M. Bentata opère une sélection très personnelle pour servir son propos. Il accuse les programmes de SES de conduire les élèves à un constat très critique des entreprises et valorisant outre-mesure le rôle de l’État. Il n’a visiblement pas lu les programmes officiels et n’a donc pas relevé que le tout premier chapitre du programme de première, consacré au marché, demande aux élèves de comprendre que le fonctionnement concurrentiel est le mode de coordination le plus efficace (« la somme des surplus est maximisée à l’équilibre»). Assez paradoxal pour un programme « anti-marché » comme le soutient M. Bentata.
L’auteur reproche également au programme de présenter les « défaillances de marché ». Pouvons-nous réellement, en 2025, présenter aux élèves le fonctionnement de l’économie de marché sans en évoquer ses limites, notamment écologiques ? Nous invitons M. Bentata à une double lecture attentive : celle des programmes de SES, mais surtout le rapport du Club de Rome de 1972 sur les limites de la croissance.
Dans de nombreux chapitres du programme, les élèves réfléchissent uniquement dans le cadre de l’économie de marché, à partir du modèle de la concurrence. M. Bentata, qui s’affiche comme libéral, devrait plutôt se réjouir que les programmes, dès la classe de seconde, défendent à ce point le fonctionnement du marché. Il aurait également pu lire le concepteur des programmes de SES, Philippe Aghion, en défendre le contenu pour mieux attaquer « le penser-faux de M. Mélenchon » et le programme économique de la NUPES lors des législatives de 2022.
Ainsi, l’APSES partage la conclusion de la tribune : l’économie est politique. Pour cette raison, l’APSES défend l’idée que les programmes enseignés aux élèves ne doivent pas verser dans un endoctrinement libéral, mais, au contraire, faire toute leur place aux oppositions théoriques, politiques, idéologiques qui traversent cette discipline. Sans une formation intellectuellement exigeante et scientifiquement rigoureuse, comment les élèves, futur·es citoyen·nes, pourraient comprendre les débats qui traversent l’espace public ? Le pluralisme des idées n’est-il pas une valeur essentielle du libéralisme, dont se réclame M. Bentata ?