https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouvelles-de-leco/les-nouvelles-de-leco-du-mardi-27-fevrier-2018

SES en détresse

Le ministre de l’éducation nationale a dévoilé sa réforme du bac et du lycée. Un tournant qui prévoit la suppression des filières au lycée et qui fait des sciences économiques et sociales une discipline de spécialité, en dehors du tronc commun, au grand dam des professeurs de SES.

Le ministre de l’éducation nationale a exposé la semaine dernière sa réforme du baccalauréat et du lycée. Celle-ci prévoit la suppression des filières, S, ES et L et la création d’un tronc commun qui comprend du français, de la philosophie, de l’histoire-géographie, des langues vivantes, de l’éducation physique et sportive et les « humanités scientifiques et numériques ».

Exit donc les sciences économiques et sociales, pourtant plébiscitées par les élèves qui sont 85% à choisir cet enseignement, dès la seconde comme enseignement d’exploration.

Ce que prévoit la réforme?

Selon le texte présenté par le ministre, les SES, exclues du tronc commun, seront désormais des enseignements de spécialité que les élèves pourront choisir à hauteur de 4h en 1ère et 6h en terminale. Actuellement, les élèves en filières ES bénéficient de 5h de SES en première et en terminale. Sans compter les enseignements de spécialité.

Mais outre ce recul dénoncé par l’Association des professeurs de sciences économiques et sociales, c’est la nature même de l’enseignement des SES qui devrait se trouver bouleverser. Avec la réforme, non seulement les sciences politiques seraient exclues de cet enseignement, mais surtout le texte revient sur la pluridisciplinarité qui était à l’oeuvre dans les cours de SES.

Cette matière, fondée en 1966 sous l’impulsion d’historiens souhaitant faire des élèves de véritables citoyens, actait en effet la nécessité d’enseigner à la fois l’économie, la sociologie et  les sciences politiques pour appréhender les enjeux de société tels que l’emploi, le chômage, la croissance ou encore les inégalités hommes-femmes.

La critique du Medef

C’est le monde de l’entreprise qui se montre le plus véhément à l’égard de l’enseignement des SES, jugée trop critiques à l’égard de l’économie de marché et du monde de l’entreprise.

Ainsi pour le numéro 2 du Medef, Thibault Lanxade “quand on aborde le monde de l’emploi, on va parler de chômage, de déclassement, de harcèlement, de pénibilité, à aucun moment on ne parlera d’épanouissement personnel, d’entreprenariat, de réussite…” dénonçant un déséquilibre dans cette description de la vie économique et en entreprise.

Erwan Le Nader, président de l’Association des professeurs de SES considère au contraire, que son enseignement subit l’influence des lobbies patronaux, qui ont toujours voulu que cette matière soit moins axée sur les problématiques économiques et sociales contemporaines et plus sur le fonctionnement de l’entreprise et de l’économie de marché.

Les craintes des professeurs de SES

Dans un article de Libération, celui-ci regrette aussi que le découpage du programme soit «devenu disciplinaire: d’un côté économie, de l’autre sociologie et une petite partie regards croisés. Or, si on veut comprendre le monde social, on a besoin de confronter les approches économiques et sociologiques».

Au-delà de cette remise en cause de la pluridisciplinarité de l’enseignement, il s’interroge également sur le risque de perdre avec cette réforme la cohérence intellectuelle et la complémentarité des disciplines proposées en filière ES.

On pourrait ainsi avoir des élèves qui choisissent d’étudier les SES, mais pas les maths, ce qui pèserait inéluctablement sur leur capacité à appréhender les raisonnements économiques dans leur globalité, mais aussi de poursuivre des études supérieures en économie s’ils le souhaitent.

Avant même de se plonger dans les problématiques de l’université, c’est donc un cri, un SOS, que poussent les professeurs de SES… »

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