Qui veut encore de la réforme Mathiot ?

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Tant de consultations pour tant d’opposition ? De nouvelles condamnations fleurissent pour une réforme pourtant basée, selon le ministère, sur une large consultation. De l’Académie des sciences aux professeurs de philosophie ou d’histoire, tout le monde trouve à redire au projet de P Mathiot. Même les frères ennemis se réconcilient dans la « conférence des associations de professeurs spécialistes » sur le dos d’une réforme qui semble maintenant mal partie. S’il est trop tôt pour savoir si la journée du 1er février sera très suivie, il est clair que la mobilisation monte et que la réforme ne trouve pas de défenseurs.

 

Chaque jour apporte son lot de critiques et de condamnations de la réforme du bac et  du lycée préparée par P Mathiot. Alors même que la réforme du collège avait trouvé ses partisans, celle du lycée n’est jusque là soutenue par aucun syndicat et aucune association professionnelle.

 

Une culture scientifique pour tous

 

Après l’Afef, l’Apses et l’Apému ce week end, de nouvelles associations font entendre leur voix.

 

L’Udppc, qui réunit les professeurs de physique – chimie,  » s’élève contre une situation qui pourrait priver une grande partie des élèves d’un enseignement scientifique pendant un an et demi, entre le milieu de la classe de seconde et la classe de terminale… La préconisation du rapport d’un enseignement scientifique faisant partie de la culture commune est en contradiction totale avec une césure possible, pour un grand nombre d’élèves, d’un an et demi de cet enseignement « . L’association demande que tous les élèves suivent des cours de physique chimie et SVT jusqu’à la fin de la première.

 

Des horaires suffisants

 

L’Apmep, association de professeurs de maths, a rompu le silence le 29 janvier pour remarquer que la semestrialisation  » risque fort de provoquer des pertes considérables dans l’efficacité des enseignements. Cela aurait également un impact significatif sur les conditions de travail des enseignants… « . L’Apmep demande aussi des horaires suffisants :  » La nature des mathématiques imposera, quelle que soit la structure de l’enseignement retenue, de conserver une large part cumulative pour les élèves se destinant à être « experts » de la discipline. Cet aspect… conditionne la cohérence des apprentissages, interne aux mathématiques et aussi externe (en lien avec les autres disciplines). Dans ce sens, il est naturel de penser que les élèves qui suivraient une majeure maths bénéficient d’un enseignement substantiel en termes d’horaire comme de contenu ». Faute d’engagement su rce point, l’Apmep  » souhaite que ces questions ne soient pas traitées dans la précipitation ».

 

Le moratoire

 

C’est justement sur l’idée d’un moratoire que se sont mis d’accord une douzaine d’associations d’enseignants où l’on retrouve l’Udppc, l’Apemu, l’APHG, l’Apmep, l’Apses, la Cnarela, et même Sauver les lettres.

 

 » La semestrialisation proposée conduira à une discontinuité des apprentissages, alors que les élèves ont besoin de temps pour s’approprier des connaissances et développer des compétences disciplinaires, dans un cadre rigoureux qui évite la dispersion. .. La complexité de l’architecture envisagée… est telle qu’elle ne sera compréhensible que par les initiés. Cela renforcera les inégalités sociales, aboutira à une concurrence délétère entre les disciplines et les établissements, brouillera les repères de l’orientation, et compliquera à l’excès la rédaction des programmes ». La coordination s’inquiète aussi de l’existence du grand oral.  » Aucune réforme d’une telle ampleur ne peut se faire à marche forcée. Les délais annoncés conduiraient, en l’état, à définir des épreuves, et à écrire des programmes dans la précipitation. Un tel calendrier est manifestement déraisonnable. C’est pourquoi nous vous demandons un moratoire sur la réforme du baccalauréat et du lycée ».

 

Alors que P Mathiot semblait avoir gagné la partie et que la mobilisation semblait n’avoir gagné que des militants syndicaux, l’atmosphère a radicalement changé. Les associations ne souhaitent pas soutenir une réforme qui pour le moment ne chiffre pas ses effets sur les horaires disciplinaires. Ce voile pudique jeté sur un impact essentiel de la réforme laisse chaque discipline craindre le pire.

 

Les associations semblent avoir trouvé la solution au piège de la mise en concurrence où aurait pu les mener cette situation. Cette solution c’est de demander du temps pour négocier la réforme.

 

Or JM Blanquer a déjà fixé le calendrier au 14 février. Qu’est ce qui pousse le ministre à aller si vite ? La volonté de ne pas laisser embourber une réforme qui doit en introduire d’autres, comme l’annualisation. Pour changer l’éducation et faire place nette à la nouvelle régionalisation et au nouveau statut des enseignants auquel il ne cesse de faire allusion, JM Blanquer ne peut compter que sur l’élan de la présidentielle. Or on le voit s’affaiblir de jour en jour sous nos yeux.

 

François Jarraud

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