Le nouveau lycée ne sera pas «à la carte»

Les épreuves terminales du bac devraient bien être réduites à quatre, comme l’avait promis Emmanuel Macron pendant sa campagne présidentielle. Mais le lycée ne connaîtrait pas un bouleversement aussi révolutionnaire que le recommandait le récent rapport de l’universitaire Pierre Mathiot. Il n’y aura pas, a priori, d’organisation modulaire « à la carte » dans lequel les élèves peuvent choisirent leur menu sur un modèle de disciplines « majeures » et « mineures », mais plutôt une redéfinition des séries actuelles.

Après trois semaines de concertations avec les syndicats, construites sur les propositions de Mathiot, Jean-Michel Blanquer doit présenter mercredi 14 février sa réforme du bac et du lycée. Reçus par le ministre, son directeur de cabinet ou la direction générale de l’enseignement scolaire, les associations disciplinaires et les représentants des syndicats dessinent les contours de cette nouvelle architecture scolaire.

Le bac comprendrait bien quatre épreuves terminales, représentant 60 % : la philosophie, un« grand oral » qui s’appuiera sur les deux disciplines de spécialité et deux épreuves de spécialité qui seront passées à la rentrée des vacances de Pâques. Les autres disciplines seront évaluées dans le cadre d’un contrôle continu, en première et en terminale. Cela semble faire consensus.

En revanche, le lycée ne connaîtra pas de transformation majeure. « Les seules modifications découleront de la nouvelle architecture du bac. Les modifications ne devront pas désorganiser les établissements. Il n’y aura pas de semestrialisation, les emplois du temps ne seront donc pas remaniés en cours d’année scolaire » au gré des choix des élèves, comme le proposait le
rapport Mathiot, explique l’Association des professeurs de philosophie (Appep). « Ce qui est abandonné, c’est le système de majeures et mineures proposé par Mathiot. Ce n’était visiblement pas assez clair », précise Erwan Le Nader, président de l’Association des professeurs de sciences économiques et sociales (Apses). Jean-Michel Blanquer travaille sur
trois hypothèses pour réformer le lycée. Première hypothèse, rien ne change. « Nous avons rappelé que c’était une option possible mais ce n’est pas ce que semble envisager le ministre », explique Philippe Tournier, secrétaire général du Snpden-Unsa, principal syndicat de chefs d’établissement. Deuxième hypothèse, on crée un pôle scientifique (soit la série S) et un pôle
« Humanités et société » regroupant la filière ES (économique et sociale) et la série L(littéraire). Le but ? Redynamiser la série L, en difficulté car de moins en moins d’élèves s’y engagent. « Elle est vampirisée par ES. Les élèves qui veulent aller en droit ou à Sciences Po préfèrent aller en ES plutôt qu’en L, qui apparaît trop spécialisée autour de la littérature et de la philosophie », poursuit Philippe Tournier. Troisième hypothèse, qui semblerait tenir la corde : une fusion des trois séries avec un tronc commun et des options « dans lesquelles on retrouvera en filigrane les trois grandes composantes actuelles ». Seule certitude, affirme-t-il, « si on réforme, c’est pour faire plus simple. On peut imaginer moins de disciplines et de plus
grands blocs horaires ».
Soulevée lundi par Les Échos, la question du sort des sciences économiques et sociales (SES) est posée. Cette discipline composite, créée en 1966, mêle économie et sociologie. Or les disciplines du lycée sont désormais censées être en adéquation avec celles de l’enseignement supérieur. Jean-Michel Blanquer pourrait être tenté de les scinder en plusieurs disciplines
(économie, sociologie, science politique). Il s’agit d’« une demande de Macron lui-même, conseillé par Michel Pébereau et Jean Tirole », avance carrément une source. Une hypothèse qui alimente l’ire de l’association des professeurs de cette discipline. Séparer l’économie de la sociologie est une demande ancienne de lobbies patronaux « pour lesquels il faudrait se débarrasser d’une sociologie jugée “compassionnelle” et recentrer l’enseignement de SES sur le fonctionnement de l’entreprise et du marché », s’agace l’Apses.
MARIE-ESTELLE PECH
Le Figaro – mardi 13 février 2018

Facebooktwittermail