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Bac 2021 : le casse-tête des épreuves de spécialité du mois de mars

Alors que la situation sanitaire empêche une reprise normale des cours dans les lycées, les syndicats d’enseignants plaident pour le report des premières épreuves du bac, épreuves que le ministère de l’éducation nationale souhaite, lui, maintenir.

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L’espoir d’un retour à la normale s’éloigne. Selon ce qu’a affirmé lundi le ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, à Ouest-France, la situation sanitaire « tendue » justifie la prolongation de l’enseignement hybride au lycée après le 20 janvier. Les quelque 537 000 élèves de terminale générale et technologique ainsi que leurs enseignants attendent désormais la conférence de presse du ministre du jeudi 14 janvier pour savoir s’ils continueront à préparer le baccalauréat 2021 (soit la première session du « nouveau bac ») en ayant cours à distance la moitié du temps.

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Les premières épreuves auront lieu du 15 au 17 mars, soit dans un peu plus de six semaines de cours. Les candidats plancheront alors sur leurs spécialités, ces deux matières choisies parmi douze possibilités en remplacement des anciennes filières L, ES et S. Elles comptent pour 32 % de la note finale et sont les plus importantes de cette nouvelle mouture de l’examen. Après l’annulation de toutes les épreuves communes (anciennement appelées E3C) en raison de l’épidémie de Covid-19, elles sont aussi l’un des derniers marqueurs du premier « bac Blanquer ».

Le ministre de l’éducation nationale a affirmé dimanche sur RTL qu’elles seraient maintenues, « dans l’intérêt des élèves ». « Il n’y aura pas de report sauf si la situation épidémique le demande », a-t-il déclaré. Les syndicats et associations d’enseignants, assortis de plusieurs syndicats lycéens ainsi que du syndicat des inspecteurs d’académie, réclament, eux, le report exceptionnel des épreuves au mois de juin.

Une équation complexe à résoudre

Pour les lycéens, l’enjeu dépasse le résultat au bac : leurs notes pèseront lourd dans les dossiers qui décideront de la suite de leur parcours. Si les épreuves se tiennent bien en mars, les notes seront renseignées sur Parcoursup et compteront dans les processus de sélection de l’enseignement supérieur. Or, elles constituent les seules notes issues d’épreuves nationales, puisque les élèves n’ont pas passé le bac de français en juin 2020.

D’où une équation complexe à résoudre. Reporter ces épreuves à juin ? Les enseignants et les élèves auraient plus de temps pour consolider les apprentissages. En revanche, les notes ne pourraient pas intégrer la procédure Parcoursup et la sélection des dossiers ne s’appuierait que sur les bulletins scolaires, sans point de comparaison national.

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Mais comment les maintenir en l’état, alors que la pandémie de Covid-19 a grévé la préparation des candidats ? Depuis le mois de mai 2020, les syndicats et associations d’enseignants réclament un allègement exceptionnel des enseignements de terminale. Rattraper le retard dû au premier confinement tout en avançant les programmes pour le bac relève, selon eux, de la gageure.

Rupture d’égalité entre les candidats

Le ministère de l’éducation nationale n’a pas retenu cette option en début d’année. Un retour en arrière est désormais impossible : tous les enseignants n’abordent pas les chapitres dans le même ordre et un allègement du programme léserait une partie des élèves. Jean-Michel Blanquer a finalement annoncé, début novembre 2020, que deux sujets seraient proposés pour chaque épreuve, afin de garantir aux candidats qu’ils « seront interrogés sur des thèmes […] qu’ils auront effectivement étudiés pendant l’année ».

Certains enseignants s’inquiètent cependant qu’une telle mesure ne soit pas suffisante. D’autant que cet aménagement ne concerne pas toutes les disciplines de la même manière. En mathématiques, par exemple, spécialité de 41 % des candidats, certains exercices portant sur « le cœur du programme » seront obligatoires, selon les consignes du ministère de l’éducation nationale. L’association des professeurs de mathématiques craint ainsi que, au vu de l’ampleur du programme, certains élèves se trouvent face à des questions qu’ils n’auraient pas eu le temps de voir en cours. Même inquiétude en physique-chimie (spécialité de 33,7 % des candidats) et en sciences économiques et sociales (spécialité de 32,9 % des candidats), deux matières qui ne laissent pas systématiquement le choix des exercices.

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De plus, quand bien même les programmes seraient bouclés, les associations et syndicats d’enseignants s’alarment d’une rupture d’égalité entre les candidats. L’essentiel de leur préparation s’est fait, pour l’heure, sous le régime de l’enseignement hybride mis en place de manière inégale sur le territoire. Depuis le mois de novembre, jusqu’à la moitié de leurs cours peuvent ainsi avoir lieu à distance.

« Dégradation des apprentissages »

Environ 69 % des établissements publics sont concernés, selon le ministère de l’éducation nationale, et les modalités de mise en œuvre ont été laissées à l’appréciation de chaque proviseur. Si cela présente l’avantage de la souplesse et de l’adaptation aux situations locales, cette organisation « à la carte » crée aussi des conditions d’apprentissage très hétérogènes selon les lycées.

Dans les établissements qui ont gardé les terminales en présentiel à 100 %, les « progressions se poursuivent presque normalement », mais « cela ne concerne qu’une minorité de lycées », constatait en décembre le syndicat des inspecteurs d’académie. D’autres font de l’enseignement à distance par demi-journées, ou par semaines. Dans ces cas-là, l’organisation faisait état d’un « ralentissement des progressions » et d’une « dégradation des apprentissages » occasionnant un « retard important » dans beaucoup de classes de terminale. « Dans les conditions actuelles, il est très probable que de nombreux élèves arriveront en mars insuffisamment préparés pour affronter une évaluation, quelle qu’elle soit », concluaient les inspecteurs d’académie.

Pour se laisser le maximum d’options sur la table afin de s’adapter aux aléas de la pandémie, le ministère de l’éducation nationale a publié le 24 décembre 2020 une ordonnance autorisant la modification des conditions du baccalauréat jusqu’à quinze jours avant les épreuves. Enseignants et élèves espèrent être fixés bien avant.

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