Le mercredi 13 octobre dernier avait lieu, à l’Université Paris Dauphine-PSL, dans le cadre de la 9ème édition du Printemps de l’Economie, la session de l’Apses et de ses trois régionales franciliennes, organisée avec le soutien d’Alternatives Economiques.
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Vous pouvez retrouver la captation vidéo de cet événement à l’adresse suivante: https://youtu.be/Bx7O8Rl5BVk
L’APSES, qui fête cette année son demi-siècle d’existence, rappelle en début de session l’histoire et les principes des cafés de sciences sociales.
Présentation générale
Elle alerte actuellement – à partir d’enquêtes qu’elle a spécifiquement menées – sur les conséquences négatives de la réforme du lycée et du baccalauréat, et notamment la suppression des séries générales au profit d’enseignements de spécialité. Des conséquences négatives, tant pour les élèves que pour les conditions de travail des collègues.

Puis, dans un premier temps, a lieu la remise des prix aux lauréats de la 5ème édition du concours vidéo « 3 minutes pour comprendre », concours coordonné cette année par deux de nos collègues Delphine Litchman ici présente et Elodie Balara.
Vidéos élèves

Pour ce concours, les élèves, accompagnés et suivis par leur professeur, réalisent une vidéo de 3 min max pour expliquer un concept au programme de seconde/1ère et terminale. 17 lycées ont participé à l’événement, y compris des lycées français à l’international, soit 35 classes, pour un rendu total de 32 vidéos. Le jury est composé de professeurs de SES, une journaliste reporter d’images, une sociologue et une économiste. Le concours est soutenu par des partenaires qui offrent des lots : Alternatives Economiques, Delagrave, Casterman, Le Lombard.

3 prix sont décernés : 2 prix du jury et 1 prix du public (à partir des likes sur la chaîne youtube de l’APSES) et quelques mentions spéciales également.
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Le groupe d’élèves présents (Mayssane Pardon et Charlotte Zimmer, encadrés par leurs professeurs Cécile Decons et Christophe Lamy) a reçu le 2ème prix du jury pour une vidéo portant sur le rôle et le fonctionnement des Banques Centrales dans la création monétaire, sujet délicat et technique, au programme de la spécialité SES en 1ère. 

Ensuite, dans un second temps, le café de sciences sociales sur le thème – Nuit Debout, Gilets jaunes… Quelles bifurcations ? Quel changement social ? – commence, avec notre modératrice, Catherine André, rédactrice en chef adjointe à Alternatives Economiques, cofondatrice et directrice éditoriale de Vox Europe, un média européen en 10 langues
Catherine André
3 intervenant.e.s se sont succédés :

  • Ludivine Bantigny, historienne, ex- maîtresse de conférences à l’université de Rouen, et désormais enseignante en Histoire-Géographie au lycée, autrice de « La plus belle avenue du monde » Une histoire sociale et politique des Champs-Élysées, Ed. La découverte, 2020,
  • Laurent Jeanpierre, professeur de science politique à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et membre du Centre de recherches sociologiques et politiques de Paris, auteur de « In Girum » Les leçons politiques des ronds-points, Ed. La découverte, 2019,
  • Erik Neveu, professeur émérite de Science Politique, auteur de « Sociologie des mouvements sociaux », Ed. La découverte, 2019.

Le point de départ de ce café est l’émergence, ces dernières années, de mouvements sociaux comme « Nuit Debout » et les Gilets jaunes, dans un contexte de turbulences démocratiques . Ces mouvements sociaux sont-ils inédits, différents ? Que peut-on dire de la sociologie des catégories d’acteurs mobilisés dans ces mouvements?

C’est Ludivine Bantigny, qui initie le débat en apportant un éclairage de longue durée, depuis son regard d’historienne.
Ludivine Bantigny

Elle rappelle tout d’abord leur proximité avec d’autres soulèvements populaires étrangers, qui ont revêtu des formes d’occupation de lieux, notamment des ronds-points et des places comme par exemple « Occupy Wall Street » dans le cadre du « mouvement des places ». Ces mouvements s’inscrivent donc dans cette dynamique internationale de fabrication de commun: par exemple, les ronds-points, qui sont habituellement des non-lieux, des espaces où l’on circule, sont devenus, avec le mouvement des Gilets jaunes, des « lieux communs ». De son point de vue, ces mouvements peuvent être vus comme des réponses à la violence sociale et idéologique dont est porteuse la phase expansionniste actuelle du capitalisme néo-libéral

Laurent Jeanpierre revient ensuite sur le mouvement des Gilets jaunes.
Laurent Jeanpierre

Il s’est interrogé, dans son ouvrage « In Girum », sur les leçons politiques des ronds-points. Il rappelle tout d’abord qu’on ne peut pas imputer le changement social aux seuls mouvements sociaux, mais que celui-ci émerge d’une dynamique d’interactions entre pouvoirs publics et mouvements sociaux. Il relativise aussi une analyse qui verrait la période actuelle comme une période de bifurcation sociale importante, dont les Gilets Jaunes constitueraient une force agissante. Si l’on a observé beaucoup de mouvements sociaux à l’échelle transnationale en 2019, la pandémie de Coronavirus a marqué un coup d’arrêt pour les mouvements sociaux: elle a été un moment de limitation des rassemblements, peu propice aux mobilisations publiques. De manière générale, la conjecture de plus longue durée qui est celle du gouvernement néolibéral du capitalisme apparaît au final peu propice à l’émergence de mobilisations sociales victorieuses.

Enfin, Erik Neveu clôt les débats en livrant son analyse sur ces mouvements émergents.
Erik Neveu
S’il lui semble abusif de parler de bifurcations pour évoquer ces mouvements, il souligne que ce terme a le mérite d’inviter à penser en quoi les mouvements Gilets jaunes et « Nuit Debout » recomposent l’espace des possibles, tout en évitant le terme galvaudé de « nouveaux mouvements sociaux »: en effet, si cette catégorie a été utile dans les années 1970 pour penser la rupture apportée par les mouvements nés dans le sillage de mai 68, elle est désormais plutôt devenue un obstacle à l’analyse des mouvements sociaux.

La session s’est clôturée par un tirage au sort, qui a permis à 3 auditeurs de recevoir chacun un exemplaire d’un des ouvrages de nos intervenant.e.s.

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