L’analyse des données publiées depuis cinq ans par la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) met en évidence des évolutions problématiques : si la réforme du lycée a permis à plus d’élèves de suivre un enseignement de sciences économiques et sociales (SES), elle a donné lieu à une dégradation des conditions de travail et d’apprentissage et a renforcé les déterminismes sociaux et de genre.
Davantage d’élèves en SES mais dans des conditions dégradées
À la rentrée 2019, les SES ont intégré le tronc commun de la classe de seconde générale et technologique. Dans le même temps, les SES sont devenues une spécialité dans le cycle terminal, dont le taux de recrutement demeure élevé. Conséquence de ces changements : le nombre d’élèves suivant un enseignement en SES a augmenté de 17 % entre 2018-2019 et 2024-2025, soit plus de
120 000 élèves supplémentaires. Mais cette augmentation s’est faite exclusivement en seconde, classe où le volume horaire pour les élèves reste très faible (1h30), et en première, mais avec une perte d’heures par rapport à la série ES.
Au final, la mise en place de la réforme a conduit à réduire de plus d’une centaine le nombre d’enseignant⋅es de SES dans les lycées publics. L’augmentation des effectifs s’est donc traduite par une augmentation inédite du nombre d’élèves par enseignant·e. Ainsi depuis 2009-2010, le nombre moyen d’élèves à la charge d’un⋅e enseignant⋅e de SES est passé de 80 à plus de 150, soit un quasi doublement.
Déterminismes de genre et d’origine sociale : rien n’a changé
La réforme du lycée général a encouragé les élèves à s’orienter librement vers des spécialités en fonction de leurs appétences. Mais en réalité une large partie des élèves reproduit, dans ses choix de spécialités, ce qu’il était possible de faire dans les anciennes filières, en associant SES et Mathématiques ou SES et HGGSP. Ces parcours cohérents sont davantage choisis par des élèves
d’origine favorisée. En revanche, les élèves défavorisés, moins informés et poussés à jouer le jeu de la réforme, ont tendance à faire des associations de spécialités plus originales, donnant lieu à une orientation plus incertaine dans le supérieur. Ainsi, alors que 53% des élèves de première de la triplette SES / Maths/ HGGSP sont d’origine très favorisée, c’est le cas de seulement 27% des élèves
de la triplette SES / LLCER / HLP.
Par ailleurs, les évolutions des choix d’orientation intégrant des SES laissent apparaître des choix de doublettes de spécialité de plus en plus genrées. Les filles sont ainsi sous-représentées dans les doublettes et les triplettes associant les SES aux mathématiques. En terminale, la part des filles parmi les élèves de la doublette SES / Mathématiques a ainsi diminué de 5 points de % depuis 2020.Finalement, la mise en place de la réforme a dégradé les conditions d’apprentissage et la plus grande liberté laissée aux élèves dans le choix de leurs enseignements masque un renforcement préoccupant des inégalités en fonction du genre et du milieu social.
L’APSES continue donc de revendiquer :
- Le retour à une organisation en séries dans la voie générale, dans un format rénové et défini nationalement, qui garantisse des parcours de formation cohérents pour l’ensemble des élèves. Dans ce cadre, les SES doivent être une discipline centrale d’une ou plusieurs séries où s’expriment des complémentarités fortes entre les programmes de SES et ceux des autres disciplines.
- L’augmentation du volume horaire des SES en classe de seconde avec des dédoublements définis nationalement pour améliorer les conditions d’enseignement autant que la formation citoyenne des élèves.
Note complète à retrouver ici: https://www.apses.org/six-ans-apres-la-reforme-du-lycee-et-du-baccalaureat-quelles-evolutions-pour-les-eleves-suivant-lenseignement-de-ses/