50 ans d’histoire tourmentée

« La France s’ennuie » écrivait Pierre Viansson-Ponté en … mars 68. Il n’y avait pourtant pas que de la routine en cette deuxième moitié des années 60 du siècle passé. On y créait même des disciplines scolaires et des séries du baccalauréat nouvelles. Une du moins, les sciences économiques et sociales, voulue par le ministre de l’Education nationale de l’époque, Christian Fouchet, et dont les premiers programmes ont été écrits par des disciples du grand historien Fernand Braudel. Souvent menacée de disparition ou de dénaturation, cette discipline a connu et connait encore une histoire mouvementée, présentée ici, ou de façon plus développée, au premier chapitre, d’« Une brève histoire des sciences économiques et sociales « .

Des initiatives

Après un coup d’envoi en « off » des Journées de l’économie, à Lyon, en novembre, qui avait permis notamment de confronter les souvenirs d’Antoine Prost, historien de l’éducation et d’Henri Lanta, un des premiers inspecteurs généraux de la discipline, l’année scolaire a été marquée par une série d’initiatives conduites par l’Association des professeurs de sciences économiques et sociales, présentées sur un blog dédié.On peut y retrouver des contributions de « grands témoins », économistes, sociologues, sportif, responsables politiques et des témoignages vidéo d’anciens élèves.

Un concours de vidéos pédagogiques réalisées par des élèves, qui devaient en 3 minutes illustrer une notion des programmes, a aussi été organisé, accessibles sur le blog.
Également sur le blog, la présentation des « balades urbaines » réalisées le 18 mars dans 8 grandes villes de France, permettant de porter un regard « affuté » par les sciences sociales sur certains espaces urbains.

Une belle fête

Le point d’orgue de ces initiatives s’est déroulé le 22 mars, dans le cadre du « Printemps de l’économie » . Beau programme : une saynète jouée par des élèves franciliens confrontant quelques « grands auteurs » des sciences sociales, une intervention de Pierre Rosanvallon plaidant pour une généralisation des enseignements scolaires de sciences sociales afin de briser les croyances et favoriser le doute scientifique, une table-ronde où Philippe Askenazy (économiste), Fabien Truong (sociologue) et Jean-François Copé (qui a souligné l’importance de la bande dessinée « Obélix et cie » dans sa formation en économie au lycée !) ont pu présenter leurs rapports singuliers avec les SES. Et le mouvement social était bien sûr de la partie avec une intervention du groupe d’action féministe La Barbe, dénonçant la composition exclusivement masculine de cette table-ronde et, plus généralement le fait que, lors du Printemps de l’économie, 88 des 113 intervenants soient des hommes.

Les résultats du concours de vidéos pédagogiques ont ensuite été présentés, avant que la Ministre de l’Éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem ne rende un hommage appuyé, et bien documenté, aux SES, insistant sur l’aspect novateur tant des contenus que des méthodes pédagogiques de cet enseignement.

De nouvelles turbulences en perspective

Élèves et professeurs auraient bien besoin qu’on les laisse travailler en paix. Pourtant, l’âge de la maturité ne sera certainement pas celui de la sérénité pour les sciences économiques et sociales. Une nouvelle offensive de la frange conservatrice du grand patronat français est lancée contre les sciences économiques et sociales, s’attirant la vigoureuse réponse de l’APSES évoquée plus haut.
Mais comme la meilleure défense c’est (souvent) l’attaque, une tribune signée de « grands noms » de l’économie, de la sociologie, de la science politique … et d’un candidat à l’élection présidentielle, paraissait dans Le Monde, où l’on peut notamment lire : « Tous les lycéens de seconde devraient bénéficier d’un enseignement de sciences économiques et sociales obligatoire dans des conditions revalorisées au regard de l’importance des sujets abordés et des démarches intellectuelles mises en œuvre. Les SES devraient également pouvoir être proposées en dehors de la seule série ES. »

Un enseignement de sciences sociales réduit à l’étude de l’équilibre du budget du ménage ou de l’opportunité d’un achat immobilier, ou bien un enseignement pluridisciplinaire de formation par et aux sciences sociales ? Une fois encore les SES sont au cœur des débats.

Gérard Grosse
23 mars 2017

http://www.idies.org/index.php?post/Un-demi-siecle